FHM n°33 Avril 2002

Photos André Rau/H&K

«Garou passe à table»

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Où Garou parle avec une extrême liberté d’inceste, d’alcool, de tabac et de Karen Mulder...

Etes-vous le plus grand chanteur québécois?

(Gêné) Oh, ça,je ne sais pas...

On parle de votre taille:1,9O m...
Ah... GiIles Vignault était grand aussi. Et Daniel Lavoie n’est pas mal non plus!

On peut vous appeler ”petitcul”?
Pas de problème! En fait, c’est”Ti-cul”. Un ti-cul, chez nous, c’est un rigolo, un branleur. Je revendique le surnom.

L’image que vous inspirez, c’est plutôt cette du “ravi de la crèche”, toujours joyeux, toujours content. Ça vous va?
(Après une longue réflexion) Ouais, c’est un peu moi. J’ai un tempérament positif.

Naïf?
Sans doute. Enfin, aujourd’hui,je suis plus lucide. Mais le cynisme ne me menace pas.

Une des seules critiques que vous ayez formulées sur le showbiz français a trait au “charity business”.
Oui,j’ai été choqué par certaines attitudes lors d’événements comme les Restos du coeur ou Ensemble contre le Sida. J’ai vu des chanteurs et leurs agents parler avec une calculette à La place du coeur...

Si on vous dit que le showbiz est un lac aux requins...
Avec les gens expérimentés qui nagent autour de moi,je n’ai guère à craindre les requins. Ce sont eux qui déguerpissent!

René Angéli et Céline Dion sont de si gros poissons?
René est vraiment très fort. Un grand pro. Et une présence physique. Un jour, j’ai assisté à une réunion en sa compagnie. Il y avait un énorme brouhaha autour de la table. René ne disait rien. Soudain, il a commencé à parler de sa voix douce, légèrement enrouée. Le silence s’est fait brutalement. Impressionnant!

Brando dans Le Parrain!
Tout à fait! En version plus honorable...

Vous avez déclaré "je suis comme le petit frère de Céline et le neveu de René”. Si on comprend bien, votre soeur a épousé votre oncle. C’est du joli!
Effectivement, si j’ai dit ça,je me suis un peu emmêlé les crayons. (Rires) Tu sais, dans nos provinces, l’inceste est monnaie courante! On épouse souvent sa cousine au Québec. Et on n’en fait pas un fromage.

Il parait que vous descendez d’un forçat français exilé au Québec...
Oui,je crois qu’il était de Rouen. Ou par là.

Et vous revenez nous casser les oreilles en guise de vengeance?
Oh, c’est pas sympa! Mais c’est vrai que la mode est aux fortes voix; comme si le public expiait son faible pour les petites chanteuses asthmatiques des années 80.

Qu’on vous accuse de bramer, ça semble vous vexer...
La dernière fois que j’ai eu droit à une remarque dans ce goût, c’était à Londres, quand on a présenté Notre-Dame de Paris. Un critique anglais a écrit que je donnais l’impression d’avoir avalé du verre pilé.

Vous vous vantez de n’avoir eu que deux profs de chant: le whisky et le tabac...
Oui,j’ai dû me faire des amis chez les enseignants! Et chez les parents... Mais je n’ai jamais cherché à avoir la voix éraillée, cela aurait été stupide. D’ailleurs, à 14 ans, je chantais dans le registre vocal de Paul McCartney.

Et jimmy Sommervile, jamais?
(Il chante You Make Me Feel...) Non, si ça ne te dérange pas je préfère le parrainage de Barry White.Il prend une voix gravissirne: “Hello, my name is Garouuuuu...”

Quelles sont les pires blagues que l’on vous ait infligées sur Quasimodo?
Devine! Des histoires de “Touche ma bosse” déplacées... Entre les comédiens, ça chambrait sec.

Vous êtes réputé joueur. Cette marotte vous a-t-elle coûté cher?
Plus jeune, il m’est arrivé de travailler seulement pour payer mes dettes. Ce genre d’expérience, ça calme!

Plutôt cigale ou fourmi?
Pardon?

C’est une référence à la fable de La Fontaine la fourmi épargneuse opposée à la cigale flambeuse.
Ah! Chez nous, on utilise surtout la parabole biblique des talents. Un homme riche confie la même somme à deux serviteurs. L’un la lui rend au centime prêt. L’autre prend des risques,investit et fait des bénéfices. Et c’est le premier qui se fait engueuler. Pour sa frilosité. La morale:l’important est de faire fructifier. Ça me va! Je suis donc Cigale ascendant Fourmi.

“Ma mission était de faire vendre de la bière”, dites-vous en évoquant le temps où vous jouiez dans les bars avec vos potes musiciens. Un record?
Je n’ai pas de chiffres précis. Mais, sans jeu de mots,je peux dire qu’on était sous pression. Ceux qui ne faisaient pas consommer étaient priés d’aller jouer ailleurs. Lors des breaks, il m’arrivait de consulter la caisse. Je voyais la tendance: x litres de Budweiser, x litres de bière locale. On adaptait notre répertoire de 200 chansons en fonction...

Ledit répertoire s’étendait d’Aznavour aux Sex Pistols. On vous imagine plus difficilement dans le dernier registre...

Détrompe-toi, j'ai été punk. Et skinhead, et heavy-metal, et new wave façon Cure... On peut dire que j’avais un sérieux problème d’identité! Chanter m’a sauvé.

Il parait que vous osiez reprendre Joe Dassin dans les bars de bikers...
Parfois, c’était chaud. Les yeux des gars en perfecto me fusillaient littéralement. Et puis, peu à peu, les défenses tombaient. Un soir, j’ai fait chanter Aux Champs-Elysées à une bande de loubards moustachus.

En tant que “vendeur” de bière, vous ne vous inquiétiez pas sur l’état dans lequel votre public allait reprendre le volant?
Si, un peu.

Vous avez eu il n’y a pas si longtemps un spectaculaire accident de voiture...
Oui,je rentrais d’Europe, claqué. Au lieu d’aller me reposer,j’ai foncé essayer une Ferrari dont je rêvais et j’ai crashé la bagnole sur un arbre. Je m’en suis tiré.

C’est donc à un érable qu’est dédié cette extrait de ralbum: “L’autoroute de ma vie filait tout droit devant. Notre rencontre est un accident”?
En quelque sorte... Enfin,j’ai aussi une pensée pour l’assureur

Où en est l’histoire de la Suissesse qui avait porté plainte contre votre chanson dite “pédophile” (Criminel)?
Ça s’est tassé,je.crois. J’ai été surpris partout le tintamarre autour de cette chanson. Avec les affaires de pédophilie galopantes,je comprends que les gens soient vigilants. Mais les intentions de Plamondon, auteur, n’étaient pas mauvaises. C’est un artiste, un vrai génie.

Dans votre album, il y a quand même des paroles gratinées: “L’amour est violent par-dedans...”Problème de lubrifiant?
Oh, quelle horreur! (il se prend la tête dans les mains.) C’est malin: je ne pourrais plus le chanter sans y penser...

Ulrika, votre compagne, est mannequin. Vous avez affirmé longtemps que Karen Mulder était votre idéal féminin. Ses déboires vous ont touché?
Karen est une chic fille. J’ai réalisé un vieux fantasme en partageant un duo avec elle lors d’une soirée en l’honneur de Céline Dion. Je ne sais pas trop pourquoi elle a pété un plomb. En tout cas, ça me fait de la peine. Si elle a besoin de moi, je suis là.
Propos recueillis par Bertrand Rocher